Les autres programmes de Musica Nova
Motetti del fiore, Lyon-Florence 1532
Ensemble Musica Nova
direction artistique : Lucien Kandel
Esther Labourdette
Christel Boiron
cantus
Lucien Kandel
Xavier Olagne
contratenors
Thierry Peteau
Jérémie Couleau
tenors
Marc Busnel
Guillaume Olry
bassus
Gérard Geay
Conseiller musical
Musica Nova propose de commémorer un événement historique, politique et religieux sans précédent, la Réforme protestante luthérienne. En 1517, Martin Luther publie sa Dispute sur la puissance des indulgences (Disputatio pro declaratione virtutis indulgentiarum) dans le but de réformer l’Église de Rome. Le chaos ainsi produit le contraint finalement à créer une Église nouvelle réformée, dissidente du Vatican. À nouvelle Église, nouvelle liturgie, et donc nouveaux chants. Luther crée un répertoire de chorals en langue vernaculaire, afin que le fidèle puisse prier dans sa propre langue et invite les compositeurs polyphonistes de son temps à écrire des motets sur les thèmes de ces chorals allemands.
C’est sur cette première étape d’élaboration du répertoire luthérien que nous nous penchons et ce pour plusieurs raisons : peu d’enregistrements et de concerts sont consacrés à ces musiques alors qu’elles constituent la base sur laquelle repose la future production luthérienne allemande jusqu’au XIXe siècle en passant par J.-S. Bach; la rencontre et l’union entre la polyphonie franco-flamande et les chorals allemands; la conservation à la Bibliothèque nationale et universitaire de Strasbourg de nombreux livres et documents musicaux imprimés dans cette ville, comme dans les autres localités réformées, témoignant de la forte implication en Alsace et dans tout le bassin rhénan de la Réforme; et enfin la très grande qualité des compositions.
l’Ensemble Musica Nova et Gérard Geay proposent une conférence et un concert consacrés aux œuvres d’un des tout premiers compositeurs luthériens, qui fut le très proche collaborateur de Martin Luther dans l’élaboration des premiers chorals publiés dès 1524, Johann Walter (1496 – 1570).
Notre projet s’articule autour d’un livre de musique intitulé Wittenbergisch Gesangbüchli, publié à Strasbourg en 1537 par Peter Schöffer & Mathias Apiarus et conservé actuellement à la Bayerische Staatsbibliothek de Munich.
Les mêmes imprimeurs ont publié la même année les Magnificat octo tonorum de Sixtus Dietrich (vers 1494 – 1548), également conservés à la Bayerische StaatsBibliothek et dont une partie de Bassvs est conservée à l’Albert-Ludwigs-Universität Freiburg. Ces Magnificat ont été publiés par Christian Meyer en 1992. Sixtus Dietrich a rendu visite à Matthäus Zell à Strasbourg à la fin des années 1520.
Répertoire :
Johann Walter / Ludwig Senfl / Sixtus Dietrich / Josquin Desprez
Nun komm der Heyden Heyland – 1524 (Veni creator gentium)
Christum wir sollen loben schon 1524 (A solis ortus cardine)
Salva nos Domine (Antienne)
Mit Fried und Freud 1524 (Nunc dimittis)
Iesaia dem Propheten (Sanctus)
Christe qui lux es et dies (Hymne pour Complies)
Christ lag in Todesbanden
Die sieben Wort – Ludwig Senfl
Christ ist erstanden
Nun bitten wir den Heiligen Geist
Wir glauben all an einen Gott (credo)
Media Vita/In mitten unsers Lebenszeit – Ludwig Senfl
Magnificat – Sixtus Dietrich
Ave Maria virgo serena – Josquin Desprez/Ludwig Senfl
Les chorals
Avec le début de la Réforme protestante naît le choral allemand. Les textes bibliques traduits en allemand permettent d’établir directement un contact entre les fidèles et Dieu. Martin Luther s’est impliqué lui-même pour constituer un répertoire de mélodies simples avec l’aide de Johann Walter. Ces mélodies pouvaient être la transposition d’un thème grégorien, mais aussi la parodie d’une chanson populaire existante, ou bien une toute nouvelle composition.
Les chorals choisis pour ce projet parcourent l’année liturgique et comptent parmi les mélodies les plus populaires que nombre de compositeurs n’ont cessé d’utiliser (Aus tiefer Not, Nun komm der Heiden Heiland, Vater unser, Christ lag in Todesbanden…). L’échelle musicale est celle de la modalité grégorienne. L’écriture polyphonique reprend les principes de la musique franco-flamande comme le contrepoint en imitation. La mélodie du choral doit rester très audible malgré le tissu contrapuntique dense à l’image des œuvres de Josquin Desprez par exemple, qui fut qualifié par Luther « Maître des notes de musique ».
Les motets
Au-delà des compositions en langue allemande, les motets polyphoniques en latin avaient leur place au sein de la liturgie protestante. Le magnificat de Sixtus Dietrich est un exemple courant de ce que l’on pouvait chanter à Strasbourg dans les paroisses luthériennes. Les autres motets de Johann Walter présentés dans ce programme, montrent la capacité de l’auteur d’écrire des musiques très élaborées, avec un contrepoint très dense à 5 voix.
Martin Luther entretenait une correspondance privilégiée avec un musicien suisse de confession catholique, maître de chapelle du Duc de Bavière, Ludwig Senfl. Son oeuvre musicale nous rappelle à bien des égards celle de Josquin Desprez, même si le contenu liturgique dénote une certaine proximité avec les idées luthériennes. Son sublime motet Media vita In mitten unsers Lebenszeit conjugue à la fois le thème grégorien latin et le choral allemand. Ses compositions sacrées en allemand semblent de ce fait appartenir au répertoire prostestant.
La musique de Josquin Desprez a connu dans toute l’Allemagne plus encore que dans le reste de l’Europe un succès colossal. Les manuscrits et les publications consacrés à son oeuvre foisonnent. Ses oeuvres ont été parodiées durant tout le XVIe siècle, surtout parmi les musiciens allemands qui en faisaient des contrafacta en remplaçant le texte initial. Dans le motet Ave Maria initialement chanté à 4 voix, Ludwig Senfl, tout aussi admiratif que Luther des oeuvres de Josquin, ajoute 2 voix supplémentaires sans toucher une seule note au modèle existant.
Projet soutenu par l’ADAMI.
L’Ensemble Musica Nova a bénéficie du soutien de la Cité de la Voix.